Sur les chemins de l’économie circulaire : réinventer les territoires et les organisations

De nombreux pays adoptent des politiques publiques pour soutenir la mise en œuvre de l’économie circulaire, une approche visant à découpler la croissance économique de l’épuisement des ressources naturelles afin de préserver les écosystèmes (RRECQ, 2023). Puisque l’économie circulaire agit comme un levier de changement des pratiques et d’évolution des modèles techniques, économiques et organisationnels (Bourdin et al., 2022), son opérationnalisation interpelle de nouvelles façons de coordonner et de gouverner l’économie, tant à l’échelle des territoires qu’à celle des organisations (Ertz et al., 2023).

Sur le plan territorial, une littérature, notamment sur les villes circulaires, se consolide depuis moins d’une décennie (Garcier et al., 2017; Kampelmann, 2016; Petit-Boix et Leipold, 2018; Prendeville et al., 2018; Williams, 2021). Cet angle territorial d’appropriation de la circularité émane d’une vision interdisciplinaire et invite à appréhender l’opérationnalisation de l’économie circulaire à travers les composantes, les leviers et les enjeux inhérents aux villes et aux régions. En ce sens, plusieurs trajectoires de recherche permettent de jeter un regard croisé sur les territoires et les écosystèmes organisationnels, mettant l’accent sur les particularités territoriales et sur les choix des acteurs du milieu (Torre et Dermine-Brullot, 2019). Elles portent aussi sur le rôle de l’économie circulaire au regard des ressources (tangibles et intangibles) et du développement socioéconomique des territoires (emplois, nouveaux modèles d’affaires, maillages d’entreprises, symbioses industrielles (Chembessi et al., 2021; Niang et al., 2023). Un autre pan de la recherche, en croissance, s’intéresse au rôle des approches du métabolisme territorial comme cadre d’analyse et d’action des parties prenantes (Amenta et al., 2022; Genois-Lefrançois et al., 2024). Enfin, les champs d’actions des différentes parties prenantes au sein des démarches de gouvernance urbaine et régionale d’économie circulaire font l’objet d’un intérêt croissant (Bucci Ancapi, 2023; Dagiliene et al., 2021).

En outre, la territorialisation de l’économie circulaire est également un enjeu de durabilité des territoires (Cesaretti et al., 2017). Elle remet en question l’utilisation des ressources et la circulation des matières (Bourdin et Torre, 2020; Cerceau et al., 2018). Divers concepts (e.g. la géographie des transitions, la transition multiniveaux, la sensibilité territoriale) alimentent la perspective socio-spatiale de la transition vers l’économie circulaire et soulignent les inégalités géographiques. Les initiatives locales et citoyennes qui en découlent sont souvent décentralisées et ne dépendent ni des feuilles de route de l’économie circulaire, ni des politiques de territorialisation. Elles ont tendance à orienter la recherche soit vers des thématiques insoupçonnées, telles la résilience Klinenberg, 2018), les Grands Défis (Brandtner, 2022; Montgomery et Dacin, 2020) et les mouvements sociaux Bringel et McKenna, 2020) les différents mécanismes de mobilisation d’acteurs et d’innovation pour transformer les modèles de production et de consommation territorialisés (Cuomo et al., 2020; Katsou et al., 2020; Nogueira et al., 2020).

C’est notamment au sein des organisations que s’opère la transformation de ces modèles d’opérationnalisation de l’économie circulaire. Sur les chemins de transition, la participation de tous les acteurs est requise : entreprises, coopératives, municipalités, organismes de développement régional, ministères et institutions publiques, agences de réglementation, établissements d’enseignement et de recherche, institutions financières et organisations non-gouvernementales (Québec circulaire, 2024). Les entreprises affectent la circularité de l’économie en fonction des ressources qu’elles utilisent, de leurs processus opérationnels et de leurs modèles d’affaires (Gruba et al., 2022 ; Oghazi et al., 2024 ; Ferasso et al., 2020). De nombreuses coopératives intègrent les principes de l’économie circulaire en appliquant des modèles opérationnels efficients, orientés vers la collaboration et le partage des connaissances et des ressources (Ziegler et al., 2023). Les organisations du secteur public encouragent de plus en plus la transition vers l’économie circulaire en adoptant des lois et règlements favorables au recyclage et à l’éco-conception ; certaines développent des infrastructures pour la gestion durable des matières et déchets (Ghisellini et al., 2016). Les organisations non-gouvernementales, quant à elles, soutiennent la transition vers l’économie circulaire en conduisant des campagnes de sensibilisation, en donnant des formations au grand public, ou encore en appuyant des initiatives communautaires (Tran Duc et Labelle, 2024).

Les organisations constituent ainsi des acteurs clés de la mise en œuvre et de la diffusion de l’économie circulaire à travers des toiles sociales, réglementaires, infrastructurelles et d’affaires. Réciproquement, l’économie circulaire interpelle les organisations (Cooper et al., 2017; Rocca et al., 2023) et les appelle à évoluer dans une démarche systémique (Normandin et Raufflet, 2021) tenant compte de l’impact des décisions sur chaque acteur du système (Skripnuk et al., 2023; Ertz et al., 2023). De nombreux obstacles se dressent néanmoins sur les chemins de la circularité et l’intégration des principes d’économie circulaire dans différents contextes organisationnels nécessite une attention soutenue de la recherche (Tran Duc et Labelle, 2024).

Objectifs

Cet appel à contribution s’inscrit dans la conversation entamée au Québec, depuis plus d’une dizaine d’années, rappelant que l’économie circulaire va au-delà du recyclage et de la gestion des déchets, et nécessite la promotion de l’efficience, la productivité et le découplage à une multitude de niveaux (Bibliothèque de l’Assemblée nationale, 2023; Chembessi et al., 2021; McDonald et al., 2016). La présentation de l’appel donne un avant-goût de la variété des possibilités d’analyse et des méthodes d’exploration. Les parallèles entre les objectifs de la circularité et les perspectives territoriales et organisationnelles s’ouvrent effectivement sur la richesse des approches scientifiques utilisées, des enjeux considérés, des acteurs interpelés et des espaces d’application. Ce dossier spécial s’intéresse aux différentes interactions permettant d’enrichir les expériences des uns et des autres au sein de processus institutionnels et organisationnels pour une transition vers une économie circulaire territorialisée. Les chercheurs et chercheuses intéressés.es sont invités.es à tisser des liens entre les démarches (supra)nationales territorialisées et les initiatives locales ou managériales, en passant par l’exploration des questions spécifiques soulevées par différentes parties prenantes.

L’appel encourage les travaux sur les communautés et la façon dont les perspectives territoriales redéfinissent les actions organisationnelles pour les rendre circulaires, et vice versa. Les chercheuses et chercheurs sont invités.es à faire appel à différents aspects théoriques, empiriques et méthodologiques des études organisationnelles, à l’intérieur et à travers les territoires, les espaces et les milieux sociétaux. Les questions d’intérêt concernent, entre autres, les formes d’organisation spécifiques émergentes du contexte territorial dans un cadre de mise en œuvre des objectifs de la durabilité et la circularité et la manière dont ces formes organisationnelles façonnent les communautés, les quartiers, les cultures, etc. Les causes, les dynamiques et les conséquences de collaborations interterritoriales et d’organisations spatiales variées ainsi que les activités de « glocalisation » font parties des interrogations suscitées.

Thématiques mobilisées

Sans exclusivement s’y limiter, les thématiques de cet appel s’intéressent aux enjeux suivants :

  • les mécanismes et instruments de gouvernance urbaine et régionale pour le déploiement de l’économie circulaire ;
  • les rôles de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme pour favoriser les activités circulaires ;
  • les écosystèmes d’acteurs localisés dans une économie circulaire urbaine : mécanismes et processus de mobilisation et de collaboration pour accélérer la transition ;
  • les innovations pour la circularité : exploration des mécanismes pour l’émergence et le passage à l’échelle des expérimentations territoriales ;
  • les partenariats organisationnels pour l’économie circulaire à travers différents territoires ;
  • les approches de production et consommation circulaires dans les entreprises individuelles;
  • la mesure de l’économie circulaire à l’aune des territoires et des organisations : outils, indicateurs et échelles appropriées.

Format des communications

Les contributions à ce dossier spécial peuvent s’effectuer sous divers formats, tel que le prévoit les différentes rubriques de la revue:

  • dossier spécial : articles de recherche en lien avec le dossier spécial ;
  • entretien : entretiens avec des acteurs liés à la thématique du dossier spécial ;
  • atelier des étudiants: articles d’étudiants en lien avec le dossier spécial ;
  • espace libre : articles de recherche qui ne sont pas nécessairement en lien avec la thématique du dossier spécial mais traitent de l’économie circulaire ;
  • notes d’actualité : brèves notes d’opinion sur un sujet d’actualité en lien avec le dossier spécial ;
  • comptes-rendus: comptes-rendus d’ouvrages en lien avec le dossier spécial ;

Un exemplaire du numéro courant de la revue apportera un bon aperçu des différentes rubriques de la revue ainsi que des formats qui y sont associés.

La longueur d’un article scientifiques (dossier spécial et atelier des étudiants) devrait se situer entre 3000 et 6000 mots (excluant les références bibliographiques). De plus, l’article devra être mis en forme selon les directives de la revue selon les normes APA7 (voir les directives en format PDF). Les résumés ainsi que les articles seront soumis à un processus d’évaluation à l’aveugle par les pairs. Les entretiens, les notes d’actualités et les comptes-rendus d’ouvrages devraient s’établir tout au plus à 3000 mots (incluant les références bibliographiques). Les résumés ainsi que les articles complets doivent être envoyés à l’adresse courriel suivante, en indiquant dans l’objet « Dossier spécial O&T – titre à modifier » : info@rrecq.ca

Présentation de la revue

« La Revue Organisations & Territoires est une revue de réflexion sur la gestion, l’innovation et le développement, principalement dans le contexte québécois et canadien. Puisqu’ils s’adressent d’abord aux acteurs sur le terrain, les articles retenus par le comité de lecture et de rédaction sont davantage concernés par la vulgarisation scientifique que par les démonstrations rigoureuses devant servir l’avancement de la science. Les auteurs peuvent toutefois se référer à un texte déjà publié qui offre une telle démonstration. […] Le soulèvement de débats et le positionnement de l’auteur dans des dossiers d’actualité sont recherchés par nos lecteurs. Ainsi, les textes publiés sont généralement simplifiés et décodés. » (Tiré du site Web de la revue)

La Revue Organisations & Territoires (ISSN : 1493-8871) est publiée depuis plus de 20 ans par le département des sciences économiques et administratives de l’Université du Québec à Chicoutimi. Elle est diffusée en version papier et est également disponible en ligne (revues.uqac.ca).

Échéancier

  • Envoi d’un résumé long (max. 1000 mots incluant les références pour les articles – max. 350 mots incluant les références pour les notes d’actualité, comptes-rendus d’ouvrages, entretiens, études de cas) : 15 novembre 2024
  • Retour des évaluations sommaires et des décisions des projets retenus : 15 décembre 2024
  • Envoi des articles complets (entre 3000 et 6000 mots incluant les références) : 15 mars 2025
  • Retour des évaluations complètes : 30 avril 2025
  • Envoi des articles révisés : 30 juin 2025
  • Décisions finales : 31 août 2025
  • Publication : 15 décembre 2025

Comité de rédaction du numéro spécial 

  • Rachida Bouhid, M.Sc., MGP, PGCA
  • Claudia Déméné, Ph.D.
  • Myriam Ertz, Ph.D. 
  • Philippe Genois-Lefrançois, M.Urb.
  • François Labelle, Ph.D. 
  • Guillaume Pain, Ph.D. 
  • Emmanuel Raufflet, Ph.D. 
  • Fanny Tremblay-Racicot, Ph.D. 
Organisations & Territoires

Appel à contribution

Le RRECQ est soutenu par les Fonds de recherche du Québec.
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