Une équipe de recherche de l’UQAM menée par Hiên Pham a mené des entretiens avec les acteurs locaux de Saint-Hyacinthe à propos du déploiement de la circularité du système alimentaire.  Découvrez le résumé de leurs travaux.  

Résumé

La prise de conscience croissante de la non-durabilité du système alimentaire dans les pays industrialisés pousse de nombreuses villes et régions à adopter des pratiques d’économie circulaire (EC). Des agriculteurs aux consommateurs, tout le monde veut profiter de l’accélération des innovations technologiques pour augmenter la quantité d’aliments disponibles, assurer une production annuelle saine et nutritive tout en réduisant l’impact environnemental du système alimentaire (Lemeilleur et al., 2020). Au Québec, plusieurs partenariats se sont formés au cours des dernières années afin de développer des projets d’EC à l’échelle des villes et des régions. Parallèlement, les villes ont été le terrain de jeu de plusieurs citoyens et entrepreneurs, qui ont amorcé des initiatives circulaires dans une variété de niches de produits, de technologies, d’infrastructures et de pratiques (Ntsonde, 2022; Weber et al., 2020).  

Dans ce contexte, nous remarquons que les études sur l’EC se sont largement concentrées sur la faisabilité technique (Fondation Ellen MacArthur, 2013 ; Lucertini et Musco, 2020), les flux de matières (Hamam et coll., 2021 ; Velasco-Muñoz et al., 2021), la logistique (Do et al., 2021 ; Kumar et coll., 2023) et la rentabilité économique (Weidner, Yang et Hamm, 2019 ; Wezel et al., 2020), laissant de côté une question très importante : quelle est la contribution des acteurs et des structures institutionnelles à la transition vers une économie circulaire, notamment dans le secteur alimentaire (Lardon et Loudiyi, 2014) ? Ce projet de recherche vise à combler cette lacune grâce à une étude qualitative des stratégies, des mécanismes et des discours d’une ville de taille moyenne et de sa région, permettant le déploiement de la circularité du système alimentaire. En utilisant Saint-Hyacinthe (QC) comme étude de cas, nous avons intégré une recherche documentaire à une série de 18 entretiens semi-dirigés auprès d’acteurs régionaux de l’alimentation et de l’économie circulaire.  

Nos résultats révèlent :  

  • Un décalage entre les responsabilités définies et pratiquées dans les initiatives d’économie circulaire pour les administrations municipales. Cette situation peut être expliquée par plusieurs facteurs, dont le manque de ressources financières et humaines; les pressions économiques et électorales à court terme; ainsi que la complexité perçue et vécue du cloisonnement du cadre réglementaire.

« On pourrait certes les promouvoir puis les valoriser. Mise à part ça, on n’a pas vraiment grand pouvoir d’influence. » Acteur 11 

« Ouais, il y a beaucoup de tatonnage, c’est comme si on était dans le noir, puis là mettons qu’on a une problématique ou un enjeu là, OK c’est qui qu’on appelle? » Acteur 12 

  • Une vision étroite dominante parmi les parties prenantes concernées par l’EC, qui penche vers une solution axée sur le marché, proposant peu d’avantages tangibles à court terme pour les villes et leurs habitants. Néanmoins, les discours mettent l’accent sur la responsabilité collective et l’action citoyenne. 

« Dans le fond, les gens encouragent les gens, les citoyens, la population à consommer des produits locales pour faire marcher les industries du coin pour pas qu’ils déménagent ailleurs. » Acteur 13 

« Parce que une entreprise, ça reste qu’il faut qu’elle pense à elle pour survivre, donc elle pourrait pas financer des projets qui vont aider nécessairement d’autres entreprises, à part [si c’est] une énorme entreprise. » Acteur 9 

  • L’avantage d’une certaine informalité pour décomposer les stratégies compartimentées à différentes échelles en offrant une approche souple, inclusive et transparente ; permettant notamment d’identifier des opportunités émergentes, de réagir rapidement aux défis imprévus et d’intégrer les connaissances locales dans la prise de décision et la mise en œuvre des stratégies. 

« Voilà, avec le centre d’éducation aux adultes, on a été chanceux parce qu’il y a des gens à l’intérieur de l’institution qui y croient. Donc ils considèrent que c’est pertinent. Puis eux, ils ont déjà une mission d’éducation fait que le fait de l’allier avec nous, mais ça leur fait une diversification des activités pédagogiques, fait que c’est porteur… » Acteur 16 

« …ce qu’il demande c’est de la démocratisation de l’agriculture. Il n’aborde même pas l’économie circulaire, fait que nous comme organisme on le passe dedans, puis on l’explique dans notre reddition de compte. On aurait le choix de pas le faire là, mais comme ça fait partie de ce qu’on veut développer, ben on l’intègre dans les projets qu’on est capable d’aller chercher, sous un autre couverture mettons. » Acteur 16 

Afin de formuler des recommandations appropriées au contexte de notre zone d’étude, nous comptons diffuser les résultats de recherche aux acteurs locaux et discuter avec eux de la signification de ceux-ci pour leur contexte et besoin spécifiques. 

À propos du projet

Le projet « Co-construction d’une compréhension locale de l’économie circulaire : imaginaire, évaluation et gouvernance à Saint-Hyacinthe » a été mené par les professeurs Hiên Pham et Juste Rajaonson de l’UQAM et leurs étudiants, Valérie Lacombe et Fabien Kerambrun. 

Le RRECQ est soutenu par les Fonds de recherche du Québec.
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